Aucune construction ne figure à cet endroit sur le plan cadastral de 1811. Le contour alors formé par un méandre de la Sèvre Niortaise n'est alors occupé que par une habitation, au sud-ouest de l'île actuelle, appelée la hutte de la Gaité. Quant à l'emplacement de la maison actuelle, dans un endroit appelé "le Marais Guérin", il est vendu le 8 mai 1838 par Marie-Magdeleine Guérin, veuve d'Etienne Barbotin (et héritière de Renée Gay, sa mère), à Louis Moreau (1781-1854), cultivateur, originaire de Vix, marié avec Marie Fleurisson (1793-1849). Celui-ci acquiert peu à peu d'autres parcelles tout autour, et construit là sa maison avant 1842 (à cette date, il y habite). Tout en poursuivant sans doute ses activités agricoles, il y ouvre une auberge qui prospère grâce, d'une part, à la clientèle des bateliers qui vont et viennent entre Niort et Marans, d'autre part au mouvement du passage par bac qui existe, jusqu'à la veille de la Première Guerre mondiale, entre la Bonde des Jourdain et les abords de la Marnerie. Le recensement de 1846 mentionne bien Louis Moreau, aubergiste, son épouse et leurs dix enfants.
A la mort de Louis Moreau, en 1854, l'auberge cesse son activité. Ses biens sont vendus aux enchères le 1er octobre 1854. L'acte mentionne notamment "une maison presque neuve appelée la maison de la Carpe, situé aux Marneries, près le passage des Jourdains, consistant en plusieurs chambres basses, cave au-dessous de l'une d'elles, corridor, chambres hautes, grange, écurie, hangar et autres servitudes". Deux des fils Moreau, Louis et Jean, cultivateurs rachètent à cette occasion la maison paternelle. Si Louis va vivre à Chaillé-les-Marais, son frère Jean reste à la Carpe. Il demeure dans une partie de la "hutte de la Carpe" avec et une de ses soeurs, Madeleine et son mari, Jean Bordet, cultivateur également, au recensement de 1861, l'autre partie étant occupée (sans doute en loyer auprès de Louis Moreau fils) par Lazare Auger, Julie Chabiron et leurs enfants. En 1866, Jean Moreau, désormais marié avec Rose Pouponnot, et les époux Auger demeurent toujours là avec une troisième famille, celle de Jean Gelot et Athénaïs Genauzeau.
Louis et Jean Moreau se partagent finalement la propriété en 1869 : à Jean la partie ouest (soit une pièce au rez-de-chaussée et l'étage correspondant ainsi que les dépendances en prolongement) ; à Louis (qui habite désormais à Chaillé-les-Marais) la partie orientale (une pièce au rez-de-chaussée, le corridor, l'étage correspondant et les dépendances en prolongement). Aussitôt, Louis revend sa partie à sa soeur, Honorine, et son époux Augustin Bourgoin, cultivateur.
La moitié ouest de la ferme détenue depuis 1869 par Louis Moreau fils est vendue en 1871 à sa soeur, Honorine, épouse d'Auguste Bourgoin, cultivateur. En 1876, la ferme, toujours divisée en deux logements, abrite d'un côté Jean Moreau, désormais veuf, et de l'autre côté les époux Bourgoin et leurs enfants. En mai 1881, ces derniers achètent sa moitié ouest de la ferme à Jean Moreau et deviennent alors les seuls occupants de la Carpe, comme le confirme le recensement de 1886.
Les conditions de vie des occupants de la Carpe changent en 1891 lorsque le canal de redressement de la Sèvre Niortaise est creusé, transformant les marais de la Carpe en île. De plus, Augustin Bourgoin décède et sa veuve, Honorine Moreau partage la ferme, le 3 juin 1898, entre ses enfants. A nouveau, la ferme est divisée en deux parties : l'une, à l'est, appartenant à Marie Bourgoin épouse d'Auguste Mignonneau, l'autre, à l'ouest, étant attribuée à Augustine Bourgoin épouse de Félix Boeuf. En 1919, veuve, cette dernière cède sa part à sa soeur qui réunit ainsi de nouveau la propriété (acte devant Me Puiroux, notaire à Vix). En 1941, celle-ci passe en indivision dans les mains des enfants de Marie Bourgoin-Mignonneau, décédée. Après la mort de leur père en 1964, ils vendent la maison en 1966 à Mme Letellier, qui la revend en 1971 à Robert Allemandou et Marcelle Ouvrard son épouse. Elle passe en 1987 à Danièle Allemandou et son mari, André Prigent.