De Plain-Martin à Pleumartin
Les premières traces de constructions remontent à l’Antiquité. Des fanums, temples gallo-romains de plan carré, ont été identifiés par prospections aériennes entre le bourg et le hameau de Crémille, à l’est.
L'actuel territoire de la commune de Pleumartin est constitué de deux anciennes paroisses mentionnées dès le 11e siècle : Saint-Sennery et Crémille. Elles forment aujourd'hui deux hameaux distincts situés à plusieurs kilomètres au nord et à l'est du bourg. Le nom de Plain-Martin, " la plaine de Martin ", n’apparaît dans les sources qu'au 13e siècle. Ce toponyme fait référence à saint Martin, fondateur de l'abbaye de Ligugé en 361, avant d'être évêque de Tours.
La terre de Pleumartin dépend anciennement de la baronnie d’Angle (aujourd’hui Angles-sur-l’Anglin), de la sénéchaussée de Poitiers et de la généralité de Bourges, dans la province voisine du Berry. La famille d’Angle, aussi appelée Barbe d’Angle, est citée en tant que seigneur de Pleumartin dès le 13e siècle. Guichard d’Angle, l’un des plus célèbres membres de cette famille, se rallie aux Anglais lors de la guerre de Cent Ans. Vers 1380, le roi de France Charles V lui confisque ses possessions et en transmet une partie à Jean Ysoré, gendre de Guichard. Cette nouvelle famille de seigneurs règne sur Pleumartin jusqu’à la Révolution.
Le château de Pleumartin a probablement été construit par ces nouveaux seigneurs au 14e siècle. Au lieu de s’implanter à proximité de l’église paroissiale de Saint-Sennery, ils font bâtir leur résidence plus au sud, au hameau de la Chaume, qui constitue l'actuel bourg de Pleumartin, près de la Luire. Flanqué de plusieurs tours défensives, le château présente un aspect fortifié et est accompagné d’un système de douves qui a en partie perduré jusqu’à nos jours. Il possède aussi sa propre chapelle castrale. Cette implantation des Ysoré génère une certaine attractivité pour la population et participe à la constitution d'un habitat groupé, futur bourg de Pleumartin.
Grâce à plusieurs alliances matrimoniales, la famille Ysoré acquiert un vaste territoire. En 1524, Jean Ysoré épouse Louise de Liniers, ce qui lui permet d’hériter de la seigneurie d’Airvault. En 1662, c’est au tour de la seigneurie de La Roche-Posay d’entrer en possession des Ysoré, après le mariage de René Ysoré III et Marie-Gabrielle Chasteigner de la Roche-Posay. Au mois de janvier de la même année, la seigneurie de Pleumartin est officiellement élevée au rang de marquisat par lettres patentes du roi de France. Cette distinction accroît encore davantage les droits et les privilèges de la famille Ysoré (droits de guet, péages, haute justice, etc.).
Pour administrer au mieux ses terres, le seigneur s’entoure de plusieurs notables. Au 18e siècle, le greffier, le procureur fiscal, le receveur et l’huissier royal exercent des charges importantes à la cour du marquisat de Pleumartin. Le marquis a aussi le privilège d'entretenir un dépôt à sel, produit nécessaire à la conservation des denrées alimentaires.
En mai 1680, le dépôt à sel est transféré à La Puye, mais il est finalement rétabli à Pleumartin en 1728 suite à un arrêt du conseil d’État. Ce dépôt se trouvait dans une maison donnant sur le champ de foire à proximité de la halle et était administré par un contrôleur dédié spécifiquement à cette tâche.
Les seigneurs de Pleumartin possèdent le moulin banal de Gauffran, situé sur un petit cours d’eau au sud de Crémille. S’ils veulent moudre leur grain, les habitants de la seigneurie doivent impérativement utiliser ce moulin et s’acquitter d’une taxe auprès du seigneur. Ce dernier possède aussi plusieurs métairies, notamment à Mézeray, à Montgré et à la Papinerie, mais aussi à Saint-Phèle-de-Maillé, à la Chapelle-Roux (aujourd’hui à Chenevelles), à La Roche-Posay, etc. Dans la deuxième moitié du 18e siècle, le fermage des métairies est renouvelé tous les ans, le jour de la Saint-Martin. Les seigneurs possèdent aussi une grande partie de la forêt de Pleumartin où les arbres sont coupés pour leur bois ou pour produire du charbon.
Un 19e siècle riche en transformations
La Révolution bouleverse les anciennes circonscriptions administratives. Les paroisses de Pleumartin et de Crémille sont transformées en communes puis fusionnent dès 1790. La nouvelle commune ainsi créée devient en 1801 le chef-lieu d’un canton qui, à l’origine, regroupe les communes de Cenan, La Chapelle-Roux, Leigné-les-Bois, La Puye, Pleumartin et Sainte-Radegonde-en-Gâtine. Ce statut lui permet notamment d'être le siège d'une justice de paix, un lieu où étaient jugées des affaires de gravité mineure à l'échelle du canton. Cette justice de proximité, rapide et gratuite, permet de traiter des cas très variés, allant de l'injure à la contestation d'une vente, à un héritage ou encore une contestation de fermage. De la même manière, Pleumartin peut accueillir une brigade de gendarmerie dès 1792. Elle est commandée par un simple brigadier jusque dans les années 1860, puis par un maréchal des logis.
Le marquis de Pleumartin, Armand Louis François Ysoré, rentré d’exil après en 1802, tente de récupérer la propriété du champ de foire et de la halle qui lui appartenaient avant la Révolution. Après de longues tractations avec la mairie, le préfet de la Vienne finit par trancher : la halle est alors rendue au marquis mais le champ de foire est maintenu en tant que place publique.
En août 1804, le cimetière, situé autour de l’église du bourg, doit être déplacé suite à une déclaration du conseil municipal. En effet, depuis quelques mois, une nouvelle loi interdit la présence de tombes à moins de 50 mètres des habitations. L’exiguïté du cimetière devient problématique et, en 1807, la commune interdit toute nouvelle inhumation pour des raisons sanitaires. Ce n’est que deux ans plus tard qu’il est transféré à quelques centaines de mètres à l’ouest du bourg, au nord de la route de Pleumartin à Châtellerault.
En 1833, la municipalité décide de faire construire un nouvel hôtel de ville. Les plans sont dressés par l’architecte châtelleraudais Louis Renaudet père : la nouvelle construction, située au centre du champ de foire, comprend une halle au blé au rez-de-chaussée (pour faire concurrence à la halle du marquis), un logement d’instituteur, une salle d’école primaire, un tribunal pour la justice de paix et un espace dédié à la mairie à l’étage. Les travaux sont réalisés un an plus tard.
Au cours du 19e siècle, le nombre de foires augmente de manière constante. Elles n’ont lieu que sept fois par an en 1857 puis se déroulent tous les mois au début du 20e siècle. Pleumartin en tire une grande renommée car elles sont particulièrement réputées pour le grain et surtout pour les bœufs qui s’y vendent. Les marchés se tiennent chaque mercredi.
Vers 1870, la culture céréalière occupe plus de la moitié de la surface de la commune. Quant aux parcelles de vignes, elles sont bien moins présentes que dans d’autres communes des environs et n’occupent que 5 % du sol. Le chanvre est aussi cultivé mais dans des proportions très réduites. Bien que l’activité agricole domine, il existe sur le territoire nombre d'industries. Au milieu du 19e siècle, une fabrique de meules de moulin est tenue par Pierre Brossier, habitant du bourg et ancien adjoint au maire. Une usine de chaux est aussi construite à la Boissière en 1867.
L’ancien moulin banal de Gauffran reste en activité pendant une partie du 19e siècle et sert de moulin à farine pour les habitants de la commune. Une huilerie, située dans le bourg à proximité du lavoir, produisait probablement de l’huile de noix.
La majorité des artisans de Pleumartin vivent dans le bourg. Avec le développement de l'activité commerciale et l’attractivité des foires, les métiers orientés vers l’accueil des voyageurs sont particulièrement bien représentés : en 1866, le bourg compte dix aubergistes, quatre cabaretiers et quatre cafetiers. Outre ces activités, les métiers de maréchal-ferrant (huit en 1866), de cordonnier (sept), de charpentier (six) et de menuisier (cinq) sont les plus exercés. Quant aux femmes, elles sont le plus souvent couturières ou lingères (six en 1866).
Le 19e siècle est aussi une période de désenclavement pour Pleumartin. Entre les années 1860 et 1870, la mairie se dote d’un télégraphe, qui facilite la circulation de l’information. De nouvelles routes sont aussi créées pour relier le bourg aux communes voisines. L’arrivée du chemin de fer à la fin du 19e siècle accélère ce mouvement de mise en réseau des villages. Le tracé de la ligne reliant Châtellerault à Tournon-Saint-Martin traverse la commune d’ouest en est. La Compagnie d’Orléans choisit, dans un premier temps, d’implanter la gare au hameau du Clou mais elle est finalement installée au sud-est du bourg, près de la route d’Archigny. Un projet de station à Crémille est sérieusement étudié pour rapprocher la ligne des communes de Vicq-sur-Gartempe et Angles-sur-l’Anglin mais il est abandonné. Si la première tranche des travaux reliant Châtellerault à Pleumartin est terminée en 1885, il faut attendre 1891 pour que la gare soit construite. Au début du 20e siècle, le quartier de la gare est doté d'un silo construit pour la coopérative agricole de la région Pleumartin-Archigny. Situé le long de la voie de chemin de fer, près de l'avenue d'Hargarten, il permet de stocker les récoltes produites sur la commune avant leur expédition par le train.
Pleumartin au 20e siècle
En 1908, l’avenue Jourde est percée au sud de la place de l’hôtel de ville. Son tracé est dessiné par l’agent voyer cantonal, Charles Alluaume. Le percement nécessite la destruction d’une grange située sur la place, ancienne propriété de Mme Jourde, qui donne son nom à la nouvelle avenue.
Au début du 20e siècle, la brigade de gendarmerie est installée dans une caserne, aujourd'hui détruite, située à l’angle sud-ouest du champ de foire, vers la route d’Archigny. Le local étant signalé comme insalubre à plusieurs reprises, les gendarmes déménagent dans le local de l’avenue des Acacias au début des années 1920.
Après la Première Guerre mondiale, la commune fait ériger un monument aux morts à proximité de la gare. L’architecte désigné par le conseil municipal est Ferdinand Milord, auteur du monument de Châtellerault et de celui de Saint-Gervais-les-Trois-Clochers, qui est une copie quasi conforme du monument de Pleumartin. L’obélisque en pierre calcaire de Lavoux est surmonté d’un coq gaulois en bronze produit par la fonderie parisienne Durenne sur un modèle du sculpteur animalier Prosper Lecourtier. Les travaux sont définitivement réceptionnés le 20 mars 1923.
Le désenclavement se poursuit dans la première moitié du 20e siècle. Plusieurs lignes d’autobus, reliant Pleumartin à Châtellerault, à Poitiers et au Grand-Pressigny, sont créées entre les années 1910 et 1930. Le confort moderne gagne progressivement la campagne : en 1932, le conseil général de la Vienne autorise la création d’un syndicat intercommunal d’électricité pour que Pleumartin et quelques communes alentours puissent construire un réseau électrique pour leurs hameaux.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la commune est coupée en deux par la ligne de démarcation selon un axe nord-est/sud-ouest. La ligne est parallèle à l’actuelle route départementale D3 qui relie Bonneuil-Matours à La Roche-Posay. Les principaux postes de gardes allemands se trouvent aux hameaux de Russais et au Grand Village qui est le siège de la Kommandantur du secteur. Un avant-poste est aussi implanté aux Faguets, à la limite de la commune de Leigné-les-Bois, pour contrôler les voyageurs voulant se rendre dans la commune, en empruntant un chemin passant par la forêt de Pleumartin pour se rendre vers le Grand Village.
Dès 1939, plusieurs villages de Moselle sont évacués pour faire face à l’avancée allemande. C’est à partir de cette date que des réfugiés de la commune d’Hargarten-aux-Mines, à proximité de la frontière allemande, sont accueillis à Pleumartin. Certains Mosellans restent plusieurs années dans la commune et tissent des liens d’amitiés avec les locaux. Encore aujourd’hui, les deux communes gardent un contact régulier et se réunissent périodiquement.